Adam, subjugué par la grandeur du hall, n’en revenait pas.
Il admirait le décor, la tête levée, la bouche grande ouverte, les yeux écarquillés.
À l’instinct, il tendit la main vers Kael sans même le regarder,
cherchant un contact physique pour s’assurer qu’il ne rêvait pas.
Kael, lui aussi impressionné par la splendeur du lieu,
restait néanmoins bien plus mesuré.
Après tout, ce qu’il avait vu et vécu récemment surpassait de loin cette vision,
rendant son émerveillement bien plus contenu.
Soudain,
il sentit les mains d’Adam lui palper le visage à l’aveuglette.
Irrité,
il lui asséna une tape sèche sur la tête.
— Aïe ! Pourquoi t’as fait ça, Brutus ?! s’écria Adam, se massant le crâne.
Kael haussa un sourcil et rétorqua, un sourire en coin, oscillant entre amusement et menace :
— La prochaine fois, réfléchis avant de tripoter n’importe quoi avec tes mains.
Adam, mi-sérieux, mi-blasé, leva les mains en signe de reddition.
— Ouais, ouais, pardon, j’ai compris…
Légèrement vexé,
il avança d’un pas décidé vers l’entrée du hall,
snobant Kael avec une moue faussement indifférente.
Mais à peine eut-il franchi le seuil que Kael l’agrippa violemment par le col
et le tira en arrière d’un geste sec.
— Mais t’es un grand malade ! J’ai arrêté de t’embêter et tu continues ? Tu veux qu’on se batte, c’est ça ?!
Kael ne répondit pas immédiatement.
Cette fois, il était réellement sérieux.
Sans un mot,
il ramassa un morceau de roche de la taille d’un poing
et le lança droit devant lui,
à l’endroit exact où Adam aurait posé son pied.
Un bruit métallique déchira l’air.
Sous leurs yeux,
une dalle carrée d’un mètre s’enfonça brusquement dans le sol,
laissant jaillir seize pieux acérés, aussi grands qu’Adam lui-même.
Un frisson glacial parcourut l’échine de ce dernier.
Son visage devint livide,
le sang semblant quitter son corps.
S’il avait avancé ne serait-ce que d’un pas de plus…
Dans son état second,
il vit soudain la main de Kael se tendre devant lui.
Il la fixa un instant,
avant de se rappeler.
Kael lui avait sauvé la mise un nombre incalculable de fois.
Se méfier de lui,
douter de ses intentions,
c’était une erreur impardonnable.
Sans hésiter,
Adam accepta son aide
et se releva.
Puis, dans un geste soudain,
il se frappa lui-même le visage du poing.
— Désolé… Je ne sais pas ce qui m’a pris. J’ai été idiot,
lâcha-t-il d’un ton amer,
mordant sa lèvre inférieure,
les poings serrés.
Sa frustration ne venait pas seulement de son impuissance.
C’était aussi l’accumulation de tous ces moments
où Kael avait été là pour lui,
sans qu’il ne puisse jamais réellement lui rendre la pareille.
Kael l’observa un instant,
avant de sourire légèrement.
— Allez, je passe devant. Tu couvres mes arrières.
Puis, avec un regard enjoué et moqueur :
— Et si tu fais mal ton boulot, ne t’inquiète pas, je m’occuperai personnellement de t’empaler sur ces pieux avant même qu’ils ne le fassent.
Malgré lui,
Adam frissonna légèrement avant de lâcher un rire nerveux.
— Hahaha… Compris, chef.
Et cette fois,
il resta bien derrière Kael.
Durant leur lente progression,
un aspect de Kael n’avait pas encore été abordé…
Le piège évité de justesse par Adam
ne l’avait pas été par simple chance ou un simple détail,
mais bien parce que Kael voyait clairement les mécanismes du piège :
les pieux sous la dalle,
la zone déclenchant le mécanisme.
Il comprit partiellement ce que voulait dire Thanatos
quand elle lui avait dit qu’il commencerait à voir le monde
qu’il lui avait autrefois été caché.
Cela devait en être une partie, probablement.
Indirectement,
Thanatos avait sauvé la vie de son ami,
mais Kael mit cette réflexion de côté.
Ce n’était pas le moment idéal pour y penser.
Malgré ce piège évité,
il réalisa que le hall était l’équivalent d’un hall de la mort.
Il y avait plus de dalles piégées
qu’il serait plus facile de compter celles qui ne l’étaient pas !
L’avantage,
c’était que ces mécanismes étaient à usage unique.
Après activation,
ils ne revenaient plus à leur état d’origine.
Un maigre soulagement,
mais utile.
— Kael : Adam, aide-moi à arracher les pieux qui ne tiennent plus trop, s’il te plaît.
Adam, intrigué par cette demande,
hésita un instant
avant de répondre,
d’un ton légèrement interrogatif :
— Adam : Tu comptes en faire quoi, Kael ? Tu ne comptes pas faire une bêtise j’espère !
dit-il d’un air très inquiet
et d’une voix tremblante.
— Kael : Il y a beaucoup trop de zones piégées dans ce hall.
Malgré tous nos efforts, on risquerait peut-être d’en louper un.
Donc, je pense utiliser ces pieux pour activer les pièges à l’avance ou en bloquer certains si besoin.
Adam, étonné et admiratif devant l’idée,
relâcha un petit soupir de soulagement
et se mit à arracher énergiquement les pieux.
De temps à autre,
un air un peu idiot s’affichait sur son visage
quand la difficulté se faisait sentir.
Après avoir arraché les derniers pieux,
Kael se tourna vers les murs du hall.
L'atmosphère changea immédiatement.
Là où la tension des pièges tendus autour d'eux avait occupé toute son attention,
un autre détail le frappa maintenant :
les gravures et bas-reliefs sculptés sur les murs et les piliers,
qui semblaient narrer une histoire ancienne, perdue dans le temps.
Il s’approcha de l’un des bas-reliefs.
Une scène complexe se déployait sous ses yeux.
Des silhouettes humanoïdes étaient figées dans des poses dramatiques,
certaines enchaînées,
d'autres affrontant des créatures colossales.
Les détails étaient d'une précision telle
qu'on aurait pu croire qu'ils allaient prendre vie d’un instant à l'autre.
Mais ce n'était pas cela qui le préoccupait.
Il se pencha plus près,
observant les symboles gravés autour des figures,
se demandant si ces images avaient un lien avec ce qu'ils étaient en train de traverser.
Adam, quant à lui,
s'était arrêté près d'un pilier imposant.
— Tu penses que ces sculptures racontent quelque chose ?
demanda-t-il en observant une scène
qui semblait représenter des guerriers combattant des monstres.
Une fois un chemin sûr dégagé à travers le hall,
Kael laissa son regard dériver vers les murs.
L’ambiance changeait.
Ici, la menace n’était plus mécanique,
mais symbolique.
Kael fronça les sourcils,
toujours concentré.
— Je crois que ces sculptures sont un avertissement.
De hauts piliers soutenaient une voûte couverte de poussière,
et sur les parois,
des fresques et des bas-reliefs complexes
racontaient des scènes étranges.
Des silhouettes aux visages effacés,
des entités aux proportions inhumaines,
des rituels oubliés.
Kael s’approcha lentement,
les yeux plissés,
comme pour percer un voile ancien.
— On dirait… une forme de récit. Mais je comprends à peine ce que je vois.
Il fit un pas de côté pour mieux observer une figure centrale,
le doigt effleurant la pierre.
— Ce mur… il se souvient. Ce n’est pas une fresque, c’est un témoin.